Kazi Mannan, un restaurateur pakistano-américain de Washington, n’a jamais hésité à aider les sans-abris en les servant gratuitement. Durement touché par la pandémie, il a vu son affaire menacée de fermeture. Mais c’était sans compter sur une mobilisation spectaculaire pour le sauver. Qui sème la bonté récolte la gratitude du monde entier.
Kazi Mannan, le restaurateur au grand coeur
Situé à quelques blocs seulement de la Maison Blanche à Washington, le Sakina Halal Grill fait un peu figure de havre de paix. Son propriétaire, Kazi Mannan, a ainsi baptisé son restaurant en hommage à sa mère, Sakina, décédée il y a plus de 26 ans, et qui lui a toujours inculqué la bonté, la solidarité et l’amour de l’autre.
De fait, le moins que l’on puisse dire est que Kazi Mannan a fait honneur à son enseignement puisque, dès l’ouverture de son établissement, il a toujours honoré sa promesse d’aider son prochain, et « quiconque a besoin d’un repas, même s’il ne peut pas le payer, est le bienvenu ».
Attention, nous vous trompez pas, le Sakina Halal Grill est un restaurant haut de gamme ! A l’heure de pointe, de nombreux clients affluent dans l’établissement pour son réputé buffet à volonté, composé de plats pakistanais et indiens. Sauf qu’au milieu des ouvriers et des cols blancs de l’administration déjeunent aussi, de manière totalement anonyme, des sans abris qui vivent la même expérience que les clients payants.
Depuis l’ouverture de son établissement, en 2015, Kazi Mannan a toujours adopté la même politique. « Si quelqu’un dit « j’ai besoin d’un repas gratuit », d’accord ! » déclare-t-il dans un grand sourire. Pas de question, pas de jugement, juste la bonté, l’entraide et la solidarité.
Une enfance de pauvreté que Kazi Mannan ne souhaite à personne
Si Kazi Mannan aide les nécessiteux, c’est qu’il a connu la pauvreté et la faim au Pakistan. Et il s’en souvient. Il n’a jamais oublié les préceptes de Sakina qui se faisait un devoir de partager avec les autres, même lorsque l’on avait pas grand chose.
Ce désir de partage s’est encore renforcé quand, à son arrivée dans la capitale américaine et alors qu’il travaillait comme taxi, il a vu les sans-abris dans la rue, par tous les temps, chercher de la nourriture dans les poubelles. Il s’est alors promis de toujours aider ces gens qui n’avaient rien.
« Je ne veux pas voir un autre être humain traverser la pauvreté et la faim que j’ai traversées » clame-t-il, avant d’insister sur sa volonté que ces sans-abris « aient le sentiment d’être acceptés ». C’est pourquoi il fait tout pour « qu’ils puissent venir s’asseoir ici et manger avec respect. »
Chez lui, les sans-abris sont les bienvenus, peuvent demander de la nourriture, utiliser les toilettes et s’asseoir aussi longtemps qu’ils le souhaitent.
« Nous les aimerons et les respecterons de la même manière que nous respectons un client payant. Nous les traiterons comme des membres de la famille » conclut Mannan.
Une promesse qu’il tient depuis, au mépris parfois de la bonne santé financière de son établissement. A titre d’exemple, il estime avoir servi plus de 16 000 repas gratuits en 2018.
Une promesse menacée par la pandémie
Avant l’arrivée de l’épidémie, Kazi Mannan servait 80 repas gratuits pas jour, en plus des repas payants. Le télétravail et le confinement ayant déserté les rues de la capitale américaine, il a dû se résoudre à laisser partir son personnel et à fermer le grill. Un crève-coeur pour celui qui ne pouvait plus assurer son métier… et son sacerdoce.
Jusqu’à ce qu’un membre de la famille ait eu l’idée de lancer, le 11 novembre, une campagne participative GoFundMe pour venir en aide à « celui qui aidait les autres ». Et la réponse ne s’est pas faite attendre…
En un peu plus d’un mois, le Sakina Halal Grill a récolté 332 906 $ (campagne toujours en cours !) au lieu des 250 000 espérés ! Une mobilisation spectaculaire telle que l’établissement pourra à nouveau ouvrir dès que les conditions sanitaires et la reprise de l’activité le permettront. Un miracle à l’américaine auquel son propriétaire n’arrive pas à croire, lui qui croyait son restaurant condamné… et qui pourra continuer à oeuvrer pour rendre le monde meilleur !
Un juste retour pour cet homme exemplaire, qui confirme les mots de l’ancien Académicien Jean-Baptiste Massillon : « plus on goûte au plaisir de faire le bien, plus on se rend digne de le goûter ».