Samedi 3 octobre est à marquer d’une pierre blanche à Venise. La Sérénissime a été sauvée de la montée des eaux provoquée par la tempête Alex. Qui est à l’origine de ce miracle ? Moïse… ou plutôt le système MOSE !
Le jour historique où Venise a peut-être été sauvée des eaux
Samedi 3 octobre sera dorénavant considéré comme un jour historique dans la Cité des Doges.
Alors que le passage de la tempête Alex, qui avait déjà frappé la France et une grande partie de l’Italie, laissait à craindre une montée des eaux (« Acqua Alta ») catastrophique, comme en novembre 2019, il n’en a finalement rien été. Au lieu d’une place St Marc submergée, les Vénitiens n’ont eu à déplorer qu’une petite flaque. Une très lointaine et rachitique cousine des dégâts apocalyptiques que la Cité des Doges s’était fatalement habituée à subir par le passé.
A qui doit-on ce miracle vénitien ?
A Moïse, ou plus précisément au Système MOSE (Module expérimental électromagnétique), attendu comme le Messie depuis 54 ans par ses 50 000 habitants, et qui pourrait renverser le cours de la nature et sauver la Sérénissime des eaux.
MOSE, attendu comme le Messie depuis 54 ans
La ville de Venise est construite sur 118 îles et îlots, en grande partie complètement artificiels ou montés sur pilotis.
Elle est depuis plusieurs années maintenant vouée à être engloutie, s’étant déjà enfoncée de 30 cm dans la mer depuis un siècle. Chaque année, des palazzi et de nombreuses habitations s’effondrent, affaiblis et rongés par la montée des eaux, grandement causée par le réchauffement climatique.
En 1966 déjà, suite à une « Acqua Alta » mémorable (1,94 m !), était évoquée la vitale nécessité de créer un rempart pour lutter contre la montée des eaux adriatiques et l’érosion de la cité. Il aura fallu attendre 2003 pour que commencent les travaux du colossal projet MOSE.
MOSE (« Moïse » en italien) est un monumental mécanisme de 78 cloisons mobiles immergées, placées aux trois points d’entrées de la lagune (Lido, Malamocco et Chioggia). Ces cloisons sont des caissons remplis d’eau (pour les garder baissées) que l’on peut relever en 30 minutes pour créer une véritable barrière. Cette dernière fournit alors à la Cité des Doges une véritable protection contre les grandes marées et les montées des eaux, pouvant aller jusqu’à 3 mètres de haut au-dessus de la normale.
Des retards de chantier et un acte manqué en 2019
Avec beaucoup d’anxiété, d’espoir mais peu de foi (comme pour un sauveur attendu trop longtemps), ce samedi 3 octobre était donc la première utilisation en conditions réelles du système. Car le moins que l’on puisse dire, c’est que les Vénitiens l’ont attendu, leur Moïse…
Entre les surcoûts, les malfaçons, les scandales de corruption de 2014 qui ont stoppé net le projet pendant de longs mois, MOSE a pris un retard aussi colossal que le projet, avec un budget dépassant allègrement les 7 milliards de budget initial.
L’espoir s’était presque éteint quand, en novembre 2019, MOSE a raté son premier rendez-vous avec une « Acqua Alta » de 1,85 m qui a tout bonnement sinistré la ville, ses infrastructures et ses lieux historiques. Pas encore opérationnelle, la barrière de protection restait désespérément baissée alors que la Sérénissime était submergée, au grand dam des Vénitiens qui ne pouvaient que constater les dégâts.
A tel point qu’ont commencé à s’élever des voix pour demander si Venise pouvait réellement être sauvée…
Le miracle d’un système qui fonctionne
Livré cet été, le MOSE est donc entré en scène ce week-end, laissant les Vénitiens pantois devant son efficacité.
Les caissons se sont vidés de leur eau, se sont relevés, et est apparue cette barrière jaune qui a fait obstacle et a contenu la montée des eaux que tous redoutaient. Quand la tempête Alex frappait durement le reste de l’Italie… Cette fois-ci, Venise ne faisait pas partie des victimes.
Bien que des questions se posent tout de même quant à la pérennité du système, concernant surtout la maintenance du dispositif et son usure (les caissons étant submergés la plus grande partie du temps), l’incertitude et le doute ont toutefois été balayés par ce premier « miracle » qui, espérons-le, pourrait bientôt n’être plus qu’un fait historique.
« Venise sauvée des eaux par Moïse »… Et si derrière ce qui sonne comme une prophétie se révélait finalement une réalité durable ?